SEance 3
Pourquoi peut-on dire que l’océan Indien constitue le coeur de la mondialisation au XVe siècle ?
Objectifs :
- Présenter un documents
- Repérer des points de vue dans des documents
- Rédiger un paragraphe
Temps 2 : Pourquoi peut-on dire que l’océan Indien constitue le coeur de la mondialisation au XVe siècle ?
Questions :
- Montre que le port de Calicut est un port au coeur des échanges dans l’océan Indien ? (documents 1 et 2)
- Dans quel produit le port de Calicut est-il spécialisé ? (document 2)
- Présente les documents 3 et 4 ?
- Comment Vasco de Gama est-il accueilli à son arrivée à Calicut d’après le document 3 ? Quels sont ses buts ?
- Quels sont les principaux reproches fait par l’auteur du document 4 aux Portugais ?
- Comment expliques-tu les critiques du document 4 ?
- A partir de tes réponses, montre que le regard porté sur l’arrivée de Vasco de Gama à Calicut est différent selon le point de vue.
Document 1 : l’océan Indien au XVe siècle : premier espace économique dans le monde.
Document 2 : le port de Calicut dans les années 1440.
Calicut est un port parfaitement sûr qui, comme celui d'Ormuz, réunit des marchands de toutes les contrées et où l'on trouve en abondance des produits rares venus de Da(e?) ryabar, du Pays sous le Vent [région de la Malaisie], d'Abyssinie et de Zanj [régions de l'Afrique équatoriale]. Parfois y arrivent des bateaux venant de la Maison de Dieu [La Mecque] et d'autres villes du Hedjaz [région de La Mecque], qui y font escale pour un temps. C'est une ville habitée par les infidèles et qui relève donc du territoire de la guerre. On y trouve cependant un grand nombre de musulmans, qui ont là leur résidence et ont construit deux mosquées où ils se réunissent pour la prière du vendredi. Il règne dans cette ville tant de sécurité et de justice que les marchands les plus riches y apportent des cargaisons considérables qu'ils débarquent et jettent négligemment sur les marchés, sans songer à en vérifier le compte. [...] De Calicut partent continuellement des vaisseaux qui font voile pour La Mecque et sont le plus souvent chargés de poivre. Les habitants de Calicut sont de hardis navigateurs : on les désigne par le nom de [Fils du Chinois] et les pirates n'osent pas en attaquer les bâtiments. On trouve dans ce port tous les objets que l'on peut désirer.
Relation de l'ambassadeur Abd al-Razzaq al-Samarqandi au nom du sultan timouride de Shahrukh. Traduction Etienne Quatremère, Notices et extraits des manuscrits de la Bibliothèque du Roi, XIV, 1843.
Cité par Patrick Boucheron, Inventer le monde. Une histoire globale du XVe siècle, La Documentation Française, 2012.
Cité par Patrick Boucheron, Inventer le monde. Une histoire globale du XVe siècle, La Documentation Française, 2012.
Document 3 : l'arrivée de Vasco de Gama à Calicut.
En touchant Calicut le 19 mai 1498, le Portugais Vasco de Gama est le premier Européen à rallier l'Inde par la mer en contournant l'Afrique.
« Ce même jour, vers le soir, nous allâmes mouiller à deux lieues au-dessous de cette cité de Calicut [...]. Nous mouillâmes le long de la côte, à environ une demi-lieue du rivage, et lorsque nous fûmes établis là, quatre embarcations parties de la terre vinrent nous trouver : ils voulaient savoir quelles gens nous étions ; ils nous annoncèrent et montrèrent Calicut. Et, le jour suivant, les mêmes barques revinrent le long de nos navires ; alors le capitan-mor [le chef de l'escadre, Vasco de Gama] envoya l'un de nos déportés [prisonniers] à Calicut, et ceux dont il était accompagné le menèrent où se trouvaient deux Maures [musulmans] de Tunis qui savaient parler le castillan et le génois, et la première bienvenue qu'ils lui donnèrent fut littéralement celle-ci : "Au diable qui te tient, qui t'a amené ici ?" Et ils lui demandèrent ce que nous venions chercher de si loin, et il leur répondit que nous venions chercher des chrétiens et des épices. Ils lui dirent : "Pourquoi donc n'envoient ici ni le roi de Castille, ni le roi de France, ni la seigneurie de Venise ?" Et il répondit que le roi de Portugal ne voudrait point permettre que ces souverains envoyassent en ces parages ; ils répliquèrent que bien il faisait. Alors ils lui donnèrent l'hospitalité et lui servirent à manger du miel et du pain de froment ; et lorsqu'il eut mangé, il revint aux navires. Or il nous arriva avec lui un de ces Maures qui, lorsqu'il fut à bord, commença à dire ces paroles : "Bonne chance ! Bonne chance !... Beaucoup de rubis... beaucoup d'émeraudes... Vous devez rendre bien des grâces à Dieu de vous avoir conduits vers une terre où il y a tant de richesses !" Et ceci était pour nous telle cause d'étonnement, que nous l'entendions parler et ne le croyions pas, ne pouvant nous persuader qu'il y eut si loin du Portugal un homme capable de nous entendre en notre langage. » |
Alvaro Velho, journal, cité dans Edouard Charton, Voyageurs anciens et modernes, T. III, Aux Bureaux du magasin pittoresque, 1855.
Document 4 : le regard d'un notable musulman d'Orient sur l'arrivée des Portugais.
Fourbe, désobéissant, et déloyal,
La plus répugnante des créatures de Dieu, c'est le Franc (1) !
(…)
Le Franc est venu à Malabar sous l'apparence d'un marchand,
Mais avec l’intention de tromper et d’escroquer.
Pour garder tout le poivre et le gingembre pour lui,
Et ne laisser que des noix de coco pour les autres.
(…)
Le Franc apporta quelques présents au samiri (2)
Et demanda à être l'un de ses sujets.
En disant qu'il aiderait le pays à prospérer
Et qu'il le défendrait contre ennemi et rebelles.
Le samiri le préféra entre tous les autres,
Et rejeta les mises en garde de ses sujets,
Qui disaient : Le Franc détruira nos terres.
Désormais, nos paroles se sont avérées,
Car il se soumit comme un esclave puis,
Ayant pris des forces, il se dressa,
Et assujettit les terres du Hind et du Sind,
Et jusqu'à la Chine : ce n'est pas un mensonge.
La plus répugnante des créatures de Dieu, c'est le Franc (1) !
(…)
Le Franc est venu à Malabar sous l'apparence d'un marchand,
Mais avec l’intention de tromper et d’escroquer.
Pour garder tout le poivre et le gingembre pour lui,
Et ne laisser que des noix de coco pour les autres.
(…)
Le Franc apporta quelques présents au samiri (2)
Et demanda à être l'un de ses sujets.
En disant qu'il aiderait le pays à prospérer
Et qu'il le défendrait contre ennemi et rebelles.
Le samiri le préféra entre tous les autres,
Et rejeta les mises en garde de ses sujets,
Qui disaient : Le Franc détruira nos terres.
Désormais, nos paroles se sont avérées,
Car il se soumit comme un esclave puis,
Ayant pris des forces, il se dressa,
Et assujettit les terres du Hind et du Sind,
Et jusqu'à la Chine : ce n'est pas un mensonge.
Mohammed ibn Abdul Aziz, « Victoire manifeste pour le samiri, qui aime les musulmans »,
poème, vers 1570, cité par Sanjay Subrahmanyam, « Comment les Indiens ont découvert Vasco de Gama »,
L'Histoire, n° 355, juillet 2010.
poème, vers 1570, cité par Sanjay Subrahmanyam, « Comment les Indiens ont découvert Vasco de Gama »,
L'Histoire, n° 355, juillet 2010.
- terme générique désignant les marchands venus d’Occident.
- souverain de Calicut